
Quel est le rôle d’un ergonome d’entreprise ?📖 Prévoir 5 minutes de lecture pour cet article.
« Les salariés ne s’amusent pas à être pliés en deux au travail »
Ergonome quelle drôle d’idée ! Et pourtant ce nom barbare, cache une sorte de Sherlock Holmes du travail, qui a pour but, non pas d’arrêter les méchants, mais d’améliorer les conditions de travail et de réduire les accidents.
Soline Vallée, ergonome en Service de Santé au Travail détaille son rôle et sa méthodologie d’intervention auprès d’une entreprise. Vous comprendrez pourquoi lancer un SOS ergonome n’est ni une honte, ni un constat d’échec. Cet expert de l’organisation du travail pourrait s’avérer être votre meilleur allié.
Dans quel cadre intervenez-vous dans une entreprise ?
Les demandes proviennent des équipes médicales du Service de Santé au Travail ou bien des entreprises directement. On intervient dans 13 000 structures adhérentes.
Nous faisons partie de la médecine du travail, qui s’appelle désormais Service de Santé au Travail (SST), car il n’y a plus seulement que des médecins du travail. Nous travaillons sur du long terme, dans l’accompagnement des entreprises. Le but est de leur fournir des clés pour analyser des situations de travail sous un angle plus ergonomique.
Nous accompagnons les employeurs et les salariés en les sensibilisant aux risques et en les aidant à identifier les problématiques et les pistes d’amélioration inhérentes.
Rencontrez-vous régulièrement des problèmes physiques ?
Dans le tertiaire, on rencontre beaucoup de salariés qui ont des maux de dos et de cervicales. Souvent ils nous disent qu’ils sont mal positionnés. Nous expliquons aux responsables d’entreprises que ce n’est pas la personne qui fait le choix de mal se positionner.
Les salariés ne s’amusent pas à être pliés en deux au travail. Par rapport aux contraintes qu’ils ont, c’est la meilleure posture qu’ils ont trouvée.

Comment êtes-vous accueillis dans les entreprises ?
Nous intervenons que si l’entreprise est volontaire. Parfois, des entreprises le font pour satisfaire le médecin du travail, mais ce n’est pas la majorité. Nous ne leur demandons pas un investissement en argent, mais en temps. En général on nous confond avec l’inspection du travail (Dirrecte).
Nous avons un gros travail pédagogique à faire quand on arrive dans une entreprise. On doit leur expliquer que nous ne sommes pas là pour juger, que nous ne sommes pas pro salariés ou pro employeur et que nous ne sommes pas présents pour contrôler. Une fois cela expliqué, l’ambiance se détend.
Au niveau des salariés, quand on s’intéresse à leur travail, ils sont intarissables.
Comment rendez-vous les salariés acteurs de leur poste de travail ?
Nous organisons des actions en entreprise avec les salariés pour les sensibiliser aux risques et leur faire comprendre les préconisations. L’objectif c’est qu’ils puissent par la suite identifier les risques à leur poste et être force de proposition pour transformer leur situation de travail.
Nous réfléchissons avec les salariés aux contraintes de leurs situations de travail et aux améliorations, car ce sont les seuls qui connaissent leur poste, donc c’est eux qui savent ce qui les aidera ou pas. Notre travail est de leur faire verbaliser.

Et du côté des employeurs ?
Nous intervenons par étapes. Souvent, les chefs d’entreprises savent qu’ils ont une problématique, comme un nombre de blessures trop important sur une chaine de production par exemple, mais ils ne savent pas forcément identifier d’où vient le problème.
Nous, nous allons problématiser, les aider à trouver des solutions. Et si la problématique sort de notre champ de compétences, nous allons les orienter vers d’autres acteurs.
Quels sont ces acteurs ?
Ingénieurs, psychologues… S’il y a un problème lié à la fonctionnalité d’une machine, par exemple, nous leur conseillons de faire appel à des prestataires spécialisés. On les aidera à compléter le cahier des charges si nécessaire par rapport aux problématiques rencontrées dans l’utilisation de cette machine. En fonction du problème, nous leur apportons les meilleures compétences, les acteurs qui pourront les aider le plus rapidement possible.
L’objectif c’est toujours que les entreprises puissent se débrouiller sans nous après notre intervention, qu’elles soient autonomes et donc plus réactives, nous restons bien entendu toujours en backup si les employeurs ont besoin d’aide.